MARC BARON
Et nous neigerons sur nos pas, un décryptage
« Je propose de présenter mes recherches actuelles, accompagnées d’extraits sonores, afin d’en extraire quelques hypothèses de travail. J’expérimente actuellement des procédés de sur-magnétisation de bandes magnétiques à partir d’enregistrements variés (le plus souvent issus de mon quotidien) : procédés simples qui entraînent effacement et chaos dans l’organisation du support. J’écoute les résidus sonores qui viennent de ces opérations mais aussi tous les artefacts qui apparaissent. Les effets que ces résidus produisent à l’écoute participent d’une sorte de cryptage, ou encore, de masquage de l’enregistrement. Ce qui m’intéresse est de confronter cette expérience technique, mécanique, ou chimique, à un travail de composition musicale ; et de chercher à découvrir la complexité qui en découle.
Ces récents travaux s’appuient sur deux intuitions centrales qui me permettent d’appréhender plus largement mon processus de travail : de la prise de son aux opérations de magnétisation. Je propose de les aborder de la manière suivante :
– l’expérience de l’écoute en situation d’enregistrement marquée par l’incertitude. Elle est déterminée par la nature de la bande magnétique (en un sens anti-naturaliste).
– les enjeux qu’il peut y avoir à travailler avec des machines anciennes, qui même si on les utilise pour leurs précisions techniques, ont tendance à fétichiser les sons enregistrés : on les entendra d’abord pour ce qu’ils sont ou ce que l’on croit reconnaître subjectivement – situation d’écoute classique pour les enregistrements de terrain – et on les entendra sans doute aussi par le prisme d’un imaginaire ancien, nostalgique, fragile, propre à la bande magnétique.
En un sens, ces machines posent peut-être aujourd’hui le problème du « genre » en musique (une sorte de maniérisme ?), et de l’évaluation de critères esthétiques dans la composition musicale. »
Marc Baron est compositeur de musique pour haut-parleurs. Il enseigne l’improvisation aux enfants et participe à des ateliers d’éducation populaire. Son travail est essentiellement lié à une pratique de studio. Ses outils sont principalement analogiques : si les magnétophones sont au centre de sa pratique, l’ordinateur en constitue la marge. Il compose à partir des spécificités du support magnétique, et cherche dans l’épaisseur du bruit de la bande à fabriquer des formes qui mélangent réalisme abimé et flou sonore le plus total. Il entretient un rapport quotidien avec la prise de son, essentiellement intime et domestique : pratique du retrait et de l’indécision pour le compositeur. Ses travaux ont été publiés sur les labels Cathnor Records, Potlatch, Moremars, Erstwhile Records, Glistening Examples.
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REFLEXIO
Cycle de conférences arts sonores et sound studies, organisé par l’université Paris 8, les Instants Chavirés et Synesthésie – MMaintenant en partenariat avec π-Node et La Générale.
dirigé par Matthieu Saladin
Toute propagation du son s’accompagne d’une réflexion acoustique, dès lors que l’onde sonore rencontre une surface qui en partie l’absorbe et en partie la réfléchit. Dérivant de ce principe, le cycle Reflexio propose une série de conférences où les paroles d’artistes, de musiciens et de chercheurs s’offrent à la réflexion partagée, dans des moments d’échange où les énoncés de chacun et chacune deviennent autant d’échos d’échos.
De la question du genre dans les musiques expérimentales aux pratiques sonores brutes, en passant par le field recording antinaturaliste, l’écoute noise, les bourdons de la contestation, ou encore les sonorités de l’invisible, ces conférences abordent quelques-unes des préoccupations qui animent, aujourd’hui, les pratiques et la recherche dans les arts sonores et les sound studies.
Avec
03.11 : Catherine Guesde, Chaos et ordres de la noise : à l’écoute des formes émergentes
17.11 : Marie Canet, Les bourdons de la contestation
01.12 : Simon Ripoll-Hurier, There is noise
12.01 : Mattin, Desecration of Experience: Social Dissonance or Fascism
09.02 : Deborah Walker, Charlotte Moorman : une violoncelliste dans l’avant-garde
16.03 : Marc Baron, Et nous neigerons sur nos pas, un décryptage