du 15 mai au 13 juin 2010

TAKE SHAPE – MAKE SHIFT/ PRENDRE FORME – PROVISOIRE

Une proposition de Charlie Jeffery

TAKE SHAPE – MAKE SHIFT/ PRENDRE FORME – PROVISOIRE
une proposition de  Charlie Jeffery
15 mai au 13 juin 2010

avec:

Christophe Bruno
Tom Dale
John Cage
Brighid Lowe
Tim Mitchell
Peter Lütje
Dan Robinson
Virginie Yassef
Matthew Houlding
Thomas Jaemes
Charlie Jeffery
Aurélie Godard
Colin Champsaur
Jason Glasser
David Gelot
Wolf Von Kries
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vernissage le 15 mai de 18h à 21h
“Radio Music” pour 6 radios de John Cage
concert à 19h
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samedi 22 mai 2010
Le Placard Festival pour casques
de 15h à 23h
http://leplacard.org/
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exposition ouverte
du mercredi au dimanche
de 15h à 19h –  entrée libre

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TAKE SHAPE – MAKE SHIFT / PRENDRE FORME – PROVISOIRE
Une proposition de Charlie Jeffery


« Je n’ai pas d’idée vers où tout ceci nous emmène, je n’ai pas de vision définitive du futur, pas de plan d’ensemble, d’un travail à l’autre, j’avance à tâtons à travers plusieurs directions différentes, comme un aveugle dans un labyrinthe. Pour chaque étape réussie, c’est déjà le passé et pour la suivante, arrive un nombre incalculable de ramifications possibles. »
György Ligeti

« J’ai l’impression que nous allons nulle part, et quel plaisir »
John Cage, A lecture on nothing.

Dans la pièce « Imaginary landscape N°4 pour 12 radios et 24 musiciens » de John Cage, un paysage éphémère de sons et d’images mentales s’active grâce aux 12 radios servant de modules de production sonore. La partition très détaillée produit un résultat très différent à chaque éxécution, en fonction du moment et du lieu de sa représentation. Un paysage instable où règne l’incertitude, où des corps sculpturaux et des formes entrent en collision, se désaxent les unes par rapport aux autres, telle est l’image mentale qui se dessine derrière TAKE SHAPE – MAKE SHIFT.

Le titre originel de ce projet d’exposition, Nowhere is Better Than Something, « nulle part c’est mieux que quelque chose » pouvait être lu de deux façons différentes : nulle part, le non-lieu est une notion plus attirante que n’importe quel objet en tant que tel. Et au contraire, n’importe quel lieu ne peut être mis au même niveau que celui d’un objet réel et défini, quelle qu’en soit sa nature.

TAKE SHAPE (Prendre forme), c’est quand quelque chose est en train de se définir, de se révèler petit à petit devant nos yeux. Là-aussi, une deuxième lecture est possible : la forme peut être déduite, ou être elle-même quelque chose de soustrait à une autre entité. Au sein de cette expression apparaît une figure du manque et du caché, dès lors que la forme surgit.

MAKE SHIFT (Provisoire) complète cette expression et peut se lire également de deux façons. Le plus souvent, une chose « make shift » est une chose transitoire qui dure un temps donné et se substitue à une autre qui, une fois prête, la remplace définitivement. Une deuxième lecture consiste à mettre en exergue cette idée de transition, cette force agissante interne, contre ou externe à l’objet. Comme s’il y avait un impératif à mettre un mouvement en action pour que quelque chose se passe. Ce mouvement agit comme un ordre, mais qui le donne et le définit? Les deux expressions présentes dans ce titre comportent ainsi un jeu complexe d’articulations : elles sont doubles dans leur propre lecture et doubles dans leur combinaison, elles se reflètent et se soulignent mutuellement. A l’instar d’une chose naissante qui sera soumise à la dislocation, au déplacement, aux forces extérieures d’un monde où rien n’est stable, où tout mute, change, se définit, se redéfinit en différé, se dissout pour se solidifier à nouveau.

René Magritte toucha de près à l’instabilité des choses en les renommant tout simplement, en plaçant le mot sur la chose comme le ferait un enfant pour faire émerger un monde transformé au travers de ces mots. Dès lors, on peut se demander quand est-ce que la définition ne devient qu’une question de traduction ? quand est-ce que l’identité se mélange avec l’interprétation ?

Les artistes présents dans cette exposition ont la volonté de laisser se manifester la mutation, le caractère éphémère, la chance, l’instabilité au sein de leurs pratiques respectives. Bien que celles-ci proviennent d’horizons et de moments différents, nous pouvons évidemment les reconfigurer et considérer l’insaisissabilité de leurs identités. Il est entendu que le spectateur/lecteur est un élément qui perçoit et agit sur le devenir de l’œuvre, et que « le lecteur du Texte pourrait être comparé à un sujet désœuvré (…) ce qu’il perçoit est multiple, irréductible, provenant de substances et de plans hétérogènes, décrochés : lumières, couleurs, végétations, chaleur, air, explosions ténues de bruits, minces cris d’oiseaux, voix d’enfants de l’autre côté de la vallée, passages, gestes, vêtements d’habitants tout près ou très loin : tous ces incidents sont à demi-identifiables : ils proviennent de codes connus, mais leur combinaison est unique, fonde la promenade en différence qui ne pourra se répéter que comme différence.”1 

1.Roland Barthes, De l’oeuvre au texte 1971 – Le bruissement de la langue. Paris: Seuil, 1984.